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Le développement durable : le concept d’un monde en mutation ?

Analyses
Le développement durable : le concept d’un monde en mutation ?


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L’expression « développement durable » apparaît pour la première fois dans un document de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), au début des années 80. Le Rapport Brundtland, au nom plus évocateur de « Our common future » (Notre avenir à tous) [[highslide](1;1;;;)
Rapport de la Commission mondiale sur le développement et l’environnement de l’ONU, présidée par Madame Gro Harlem Brundtland, Avril 1987
[/highslide]], publié en 1987, va populariser le concept. Il parle d’un

mode de développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs », qui permet de « satisfaire les besoins humains fondamentaux et d’améliorer le niveau de vie pour tous, tout en protégeant et gérant mieux les écosystèmes et assurant un avenir plus sûr et plus prospère.

La notion a de quoi séduire car elle répond à une vision holistique qui réunit des critères à la fois environnementaux, économiques et sociaux. En outre, elle s’inscrit dans une vision pérenne, éco-systémique et inclut la notion de participation. C’est aussi un concept né internationalement. A sa suite, lors de la Conférence de Rio, de 1992, sous l’égide des Nations Unies, la Déclaration de Rio et Action 21 définit 27 principes de développement durable et un programme d’action participatif dans une quarantaine de domaines, mieux connu sous le nom d’Agenda 21 [[highslide](2;2;;;)
Déclaration de l’environnement et du développement, Juin 1992.
[/highslide]]. Par ailleurs, des liens se tissent entre la lutte contre les changements climatiques et l’objectif de développement durable, puisque la Convention-cadre sur le climat de 1992 a été élaborée en même temps que la préparation de Rio en 1992 [[highslide](3;3;;;)
Le climat, un équilibre, Michel Mousel, in Les nouveaux utopistes du développement durable, Autrement, 2005, p. 190
[/highslide]]. Le Sommet de la terre de juin prochain, à Rio, portera à nouveau sur le développement durable.
Mais qu’en est-il du concept 20 ans après ?

Un concept complexe

Le développement durable est indissociable de la cause environnementale, mais pas uniquement. Les impacts sur l’environnement de nos modes de production et de consommation, la perte de la biodiversité, le renchérissement des matières premières, le changement climatique, ont contribué, dans la deuxième partie du 20ème siècle, à attirer l’attention sur un modèle de développement industriel dommageable pour l’environnement. Néanmoins, scientifiques, philosophes, sociologues, économistes et « créateurs culturels » ont apporté leur touche personnelle, transformant le concept en autant de savoirs et de courants de pensée, dépassant la question environnementale stricto sensu.
Du point de vue philosophique, le concept a eu une évolution parallèle à celui de la modernité. Après une première modernité, issue de la philosophie de Descartes puis des Lumières, se fondant sur le rationalisme et le progrès scientifique puis technique, apparaît une seconde modernité. Celle-ci voit l’autoréflexion, la conscience de la « société du risque »[[highslide](4;4;;;)
Voir : La Société du risque, Ulrich Beck, 1986, version française 2001
[/highslide]], d’un « progrès définalisé » [[highslide](5;5;;;)
Le progrès en est-il un ?, Luc Ferry, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 255
[/highslide]] (les fins disparaissant au profit des moyens). Le découplage entre croyance dans le progrès et épanouissement de l’individu. L’autocritique, issue elle aussi de l’esprit des Lumières, touche ainsi le progrès, la maîtrise par les gouvernants des instruments de la démocratie :

plus personne ne sachant à vrai dire, si le développement en tant que tel, c’est-à-dire à l’accroissement de la puissance instrumentale, procure aux hommes davantage de bonheur et de liberté. [[highslide](6;6;;;)
Le progrès en est-il un ?, ibid, p. 255
[/highslide]]
Les enjeux du développement durable sont tout à la fois profondément personnels et amplement collectifs. [[highslide](7;7;;;)
Rendre la vie possible, Anne-Marie Ducroux, in Les nouveaux utopistes du développement durable, Autrement, 2005, p. 191
[/highslide]]

Dans une société de réseaux, d’économie interconnectée, d’institutions reliées à différents niveaux de compétence et de dimension géographique, les données sont de plus en plus systémiques, globalisantes ou éclatées et contradictoires. En même temps, l’épuisement des ressources mais aussi la recherche de nouveaux modèles de société concourent au sentiment de finitude et d’incertitude. Ce qui induit prise de responsabilité et principe de précaution mais pose aussi la question des priorités :

L’équivalence monétaire met sur le même plan l’essentiel et l’insignifiant. [[highslide](8;8;;;)
William Rees, cité par Anne-Marie Ducroux, ibid. p.11
[/highslide]]

Dans ce contexte, le développement durable apparaît comme un concept qui incarne la complexité du monde. Ce qui fait à la fois son succès et son imprécision ; ce qui explique aussi les difficultés de mise œuvre. La transversalité de l’approche tranche avec la vision sectorielle dominante. De plus, se combinent une solidarité synchronique (sociale) et diachronique (avec les générations futures) qui jouent sur les repères spatio-temporels. Enfin, aux piliers traditionnels du développement durable (économique, social et environnemental), certains ajouteraient bien un pilier « culturel », dimension importante pour évaluer, par exemple, les projets d’autres cultures que la nôtre.
Le développement durable, enjeu de communication ?

Il existe aussi de l’indifférence par méconnaissance de ses enjeux, ainsi que du scepticisme pour une notion perçue par certains comme un enjeu de communication. [[highslide](9;9;;;)
Anne-Marie Ducroux, ibid. p. 17
[/highslide]]

Le terme anglais « sustainable » (soutenable, viable) est de surcroît plus explicite que le terme français « durable ». En raison de sa complexité, certains lui préfèrent, le terme d’« environnement », plus délimité et accessible.
Enfin, aux yeux de certains, le consensus qui prévaut aujourd’hui autour du développement durable nie les intérêts contradictoires entre travail et capital, l’aspect conflictuel entre dominés et dominants. Le développement durable serait un concept inventé dans les pays développés et assimilé à la croissance économique, accompagnée de certaines conditions sociales et environnementales, le moins en rupture avec les présupposés politiques et idéologiques dominants.

Un concept en évolution

Le développement durable est issu de plusieurs initiatives internationales et de mouvements qui ont remis en cause les modèles de société. La deep ecology, par exemple, mettait en cause l’anthropocentrisme occidental et déboucha sur la revendication de droits de la nature. Le Sommet de Stockholm, de 1972, traitait de l’environnement et a changé l’organisation des grandes conférences internationales puisque des activités parallèles furent un lieu d’expression pour la société civile.
Le Sommet de Rio en 1992 a associé environnement et développement. Grâce à l’existence d’un forum parallèle, la conférence a été très médiatisée. Les conventions signées et les institutions de l’environnement créées à la suite ont fourni un premier cadre international. En 2002, le Sommet de Johannesbourg a confirmé les objectifs de développement durable et a intégré davantage les entreprises dans la démarche.
Le dernier quart du 20ème siècle a permis de mieux connaître le fonctionnement de la biosphère, les phénomènes liés au changement climatique, l’épuisement des ressources naturelles. Depuis le début du 21ème siècle, se pose davantage la question de la mise en œuvre des principes et objectifs déterminés lors des premiers Sommets de la Terre. D’ailleurs, au vu des enjeux planétaires cruciaux, il est plus que temps d’établir un plan chiffré, un agenda et un échéancier. Certains profitent du fait qu’on ne sache pas exactement de combien les températures et les océans monteront ni avec précision les effets différenciés selon les régions pour remettre à plus tard ce qu’on aurait déjà dû faire hier ! Or nous avons suffisamment de données pour avancer : orienter la recherche agricole vers les caractéristiques du futur climat, prévoir que le paludisme deviendra endémique dans certaines régions d’Afrique australe d’où il était auparavant absent. [[highslide](10;10;;;)
Le développement durable, une nécessité pour les pays du Sud, P. Jacquet et J. Loup, Regards sur la Terre 2009, p. 188
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Depuis la crise financière puis économique de 2008, on observe une frilosité accrue vis-à-vis des changements structurels nécessaires. Les séances préparatoires au Sommet de Rio+20 ont même vu certains pays revenir sur certains droits humains comme le droit à l’alimentation, le droit à l’eau potable et à l’assainissement et le droit au développement. Certains vont jusqu’à remettre en cause les principes de Rio de 1992 tels que le « principe pollueur-payeur », le « principe de précaution » et la « responsabilité commune mais différenciée » (RCMD) des pays les plus développés [[highslide](11;11;;;)
Newsletter Switch 12, ANPED
[/highslide]]. Du côté de la perte de la biodiversité, la cible que le monde s’était donné pour 2010 ne s’est pas concrétisée non plus. Or près de 17 000 espèces végétales et animales risquent l’extinction. On ne s’est pas attaqué suffisamment à ses causes (aménagement du territoire, agriculture industrialisée, standardisation de la consommation, perte d’habitat, espèces invasives, pollution et changement climatique), alors que des milliards de personnes dépendent directement de la biodiversité pour leur survie.
Il est vrai que, parallèlement aux Sommets de la Terre, s’affirmait, dans les années 1990, une tendance peu encline au développement durable.

Historiquement nous sommes arrivés avec ce concept et cette conscience ou quinze ans trop tard, ou cinquante ans trop tôt, parce que cela coïncidait avec la contre-évolution néolibérale prônant la déréglementation des Etats. Enfin, la fin de la guerre froide a considérablement diminué l’intérêt des pays industrialisés pour le développement du tiers-monde, et la mondialisation a changé les règles du jeu. [highslide](12;12;;;)
Une civilisation de l’être, Entretien avec Ignacy Sachs, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 36
[/highslide]

C’est cette tendance conservatrice qui se rappelle à nous, à la veille du Sommet de juin.
Néanmoins, les partisans du développement durable préparent une société « en transition ». Des conditions préalables sont évoquées.

L’efficacité des stratégies de transition dépendra du degré d’audace dans les changements institutionnels, de l’habileté à définir des politiques multidimensionnelles et de la capacité à réorienter les progrès techniques. [[highslide](13;13;;;)
Une civilisation de l’être, Ignacy Sachs, in Les nouveaux utopistes du développement durable, Autrement, p.28
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Dates clés du développement durable

1951 : L’Union internationale pour la conservation de la nature publie un rapport préoccupant des liens entre l’économie et l’écologie.
1960 : Les Nations Unies font de la décennie 1960 celle du « développement » et adoptent le principe d’une aide publique au développement égale à 1% des PIB.
1972 : Publication du premier rapport du Club de Rome, The Limits of Growth intitulé en français Halte à la croissance qui attire l’attention sur la pollution et l’épuisement des ressources en matières premières.
1972 : Première conférence des Nations Unies sur l’environnement et création du PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement).
1980 : L’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) publie un document où apparaît pour la première fois la notion de développement durable : Stratégie mondiale de la conservation.
1987 : Rapport Brundtland : Notre avenir à tous.
1992 : Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement (CNUED) et création dela Commissionmondiale du développement durable
1997 : 19ème session spéciale / Nations Unies : Programme d’implémentation de l’Agenda 21
2002 : Sommet mondial du développement durable à Johannesbourg
2006 : Rapport Stern sur le coût financier du changement climatique et la nécessité de limiter les GES (gaz à effet de serre)
2009 : Résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies (A/RES/64/236) d’organiser une conférence en 2012 autour de l’économie verte et de la gouvernance du développement durable

« Agir local, penser global » ?

Dès 1972, la double proposition « agir local, penser global » établit un lien entre les initiatives à développer sur le terrain et une conception globale du développement. Il peut s’agir du développement d’un agenda 21 au niveau de la commune, de l’installation citoyenne d’une éolienne, d’un groupe d’achat commun de quartier pour la vente de légumes et de fruits ou d’un système de location de vélos ou de voitures à partager… Le lien entre projet et territorialité est important. Ce qui n’empêche une vision globale d’un développement inclusif. Toute la question est l’articulation entre le niveau global et le niveau local, en raison des approches respectives différentes.
D’autre part, selon qu’on se place dans une vision universelle du concept ou qu’on tienne compte des niveaux de développement, la dimension sera tantôt qualitative, tantôt quantitative. Même s’il n’y a pas d’exclusive, dans les pays industrialisés les préoccupations sont davantage liées au cadre de vie ou au coût des ressources, tandis que dans des pays moins développés la priorité est liée à l’accès même des ressources ou des services puis du coût et des modalités.
Le développement durable est inscrit dans nombre de documents officiels, nationaux et internationaux, européens depuis 1997, dont le Traité de Maastricht, mais c’est un concept difficile à définir sur le plan juridique. Traduire ce concept complexe dans le corpus des textes, lui donner la plénitude de ses effets juridiques, dont une valeur contraignante, n’est pas chose aisée. C’est d’ailleurs l’une des difficultés que rencontrent ceux qui veulent appliquer les principes établis lors des grandes conférences internationales comme celle de Rio.

A défaut d’un contenu explicite, le développement durable apparaît plus comme un ensemble d’objectifs que comme un ensemble de normes créant des obligations et des droits. [[highslide](14;14;;;)
Le développement durable saisi par le droit, Jocelyne Dubois-Maury, in Le développement durable : approches plurielles, sous la direction d’Yvette Veyret, Hatier, 2005, p. 43
[/highslide]]

Or, la règle de droit exige rigueur du champ d’application, précision des objectifs, définition des compétences et des moyens. Les différents niveaux de législation compliquent encore la donne.

La question est alors posée de la pertinence d’une codification unique qui rendrait plus effectifs les objectifs d’un développement durable qui sont eux-mêmes multiples, extensifs et relèvent d’approches globalisantes et transversales. [[highslide](15;15;;;)
Le développement durable saisi par le droit, ibid. p. 53
[/highslide]]

Un concept à la mode, donc récupéré ?

Depuis son apparition, le développement durable a été de plus en plus utilisé dans les médias de masse, pour décrire des projets ou des objets en lien avec l’environnement, jusqu’à récupérer le concept à des fins mercantiles. Le marketing durable s’est développé en tirant profit de l’intérêt des consommateurs pour la nature, le bien être, la santé mais aussi des images d’Epinal fleurant « le bon vieux temps ». Un peu comme le fairwashing pour les produits qui surfent sur la vague équitable,  le greenwashing est passé par là (publicités « durables » sur l’énergie, les voitures, les détergents, l’alimentation, le tourisme …).

Le développement durable ne fera pas long feu s’il est « récupéré » ; il risque de rejoindre la cohorte des désillusions si les investissements d’image sont plus substantiels que les renversements de comportement qu’il devrait inspirer. [[highslide](16;16;;;)
Une aspiration de vérité, Patrick d’Humières, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 121
[/highslide]]

Les dérives peuvent même aller jusqu’à la publicité mensongère comme ce fut le cas de Shell et de Monsanto, multinationales condamnées il y a quelques années par la justice pour avoir induit les consommateurs en erreur. Consommateurs sur lesquels on fait peser une responsabilité individuelle alors que la question est plus large :

Cette approche présente la faiblesse de donner l’impression que, face à une problématique globale et complexe comme le changement climatique ou la volatilité des cours des matières premières agricoles, il suffit d’agir en tant que consommateur ou qu’il n’est pas possible d’agir autrement qu’en tant que consommateur. [[highslide](17;17;;;)
Des coopératives pour démocratiser l’économie, François Graas, Oxfam-Magasins du monde, Janvier 2012, p.16
[/highslide]]

La notion de participation

Si on représentait le développement durable au moyen d’une construction sur plusieurs piliers, chacun représenterait un domaine d’application, en l’occurrence environnemental, social et économique. Si on devait ajouter un soubassement à la construction, ce serait la notion de participation. En effet, le concept de développement durable n’est pas apparu à n’importe quel moment de l’Histoire, mais bien après la conquête de droits sociaux et humains, la liberté d’expression, la contre culture…
L’idéal poursuivi est donc un développement qui soit porté par le plus grand nombre pour le plus grand nombre.

Le développement durable ne se décrète pas, il se construit en commun. Nul n’en est propriétaire ; ni les économistes, ni les écologistes, ni les ingénieurs, ni les sociologues ou les politiques. C’est grâce à une démarche de concertation que, véritablement, les projets d’infrastructure, de territoire se construisent sur des bases durables. [[highslide](18;18;;;)
Concertés parce que concernés…, J.-M. Simon, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 59
[/highslide]]

Les Agenda 21 offre un bon exemple d’exercice démocratique, pour une amélioration continue sur un territoire donné. Certains projets collectifs de développement d’énergies renouvelables, dans des villages de pays en développement, reposent sur le même principe. La participation de la société civile aux grandes conférences internationales sur l’environnement illustre la même tendance.

Indicateurs du développement durable

La question des indicateurs, pour quantifier ou qualifier le développement durable, se pose aux politiques et experts mais concerne aussi la société civile. En effet, il s’agit d’objets scientifiques construits soumis à des exigences parfois difficilement compatibles : la rigueur scientifique, l’efficacité politique et la légitimité démocratique. De plus, en Belgique,
la nouvelle structure institutionnelle a pour effet que les trois piliers du développement durable (économique, social et environnemental) relèvent de la compétence de pouvoirs publics différents. [[highslide](19;19;;;)
Avis sur les indicateurs de développement durable, approuvé par l’assemblée générale du 16 avril 2005, Conseil Fédéral du Développement Durable (CFDD) :
[/highslide]]
Au niveau des futures négociations du Sommet de Rio, il sera important d’avoir une base commune pour évaluer enjeux et résultats. L’Union Européenne donne une base d’indicateurs clés par thème. Aux pays membres, s’ils le souhaitent, d’assortir cette base d’autres indicateurs.

Indicateurs du développement durable pour l’Union Européenne (2011)

Thème

Indicateurs clés

Développement socio-économique PIB réel par tête, croissance et totaux
Consommation et production durable Productivité des ressources
Inclusion sociale Population à risque de pauvreté ou d’exclusion
Changements démographiques Taux d’emploi des personnes âgées
Santé publique Nombre d’années de vie en bonne santé et espérance de vie à la naissance, par sexe
Changement climatique et énergie Émissions de gaz à effet de serre, Kyoto année base
Part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie
Transport durable Consommation énergétique des transports par rapport au PIB
Ressources naturelles Indice des oiseaux communs
Prises de poissons sur les stocks en dehors des limites biologiques sécurité: Etat des stocks de poissons gérés par l’UE dans le Nord-Est de l’Atlantique
Partenariat global Aide publique au développement proportionnellement au revenu national brut
Bonne gouvernance pas d’indicateur clé

 

Ne pas oublier les droits humains !

Les critères environnementaux et économiques du développement durable ne doivent pas faire oublier

la réalisation de tous les droits de l’homme (civils, politiques, économiques, sociaux et culturels), la préservation de l’environnement n’en étant qu’une des conditions. [[highslide](20;20;;;)
A la recherche des droits perdus, A.-C. Habard et M. Guiraud, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 239
[/highslide]]

La primauté des Droits de l’Homme sur les conventions internationales, notamment marchandes n’est pas consacrée. La prééminence de la nature sur l’homme réapparaît non sans étonner certains.

C’est là la raison pour laquelle très logiquement, le terme de besoins a été préféré à celui de droits : les droits supposent de penser la prééminence de l’être humain sur le monde naturel ; le terme de besoins, à l’inverse, réinscrit l’homme dans la naturalité (…), et pourrait mettre en danger l’une des avancées essentielles de ces 50 dernières années : la reconnaissance de l’égalité en dignité de tous les êtres humains. [[highslide](21;21;;;)
Ibid. p.241
[/highslide]]

Le principe 1 de la déclaration de Rio 1992 stipule que « les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable ». Or quand on parle de développement durable, les changements climatiques  ou  l’économie « verte » sont plus souvent au devant de la scène que les droits humains. D’autre part,

on peut s’interroger sur le soudain engouement des entreprises pour le développement durable, alors qu’elles ont toujours refusé de se sentir liées par des normes internationales en matière de droits de l’homme. [[highslide](22;22;;;)
Ibid. p.240
[/highslide]]

Les conséquences sociales des fléaux environnementaux (pollution, inondations, insécurité alimentaire, désertification, épuisement des stocks halieutiques…) sont très importantes. Déplacements massifs de populations, inégalité croissante en matière d’accès aux ressources naturelles et énergétiques, conséquences sur la santé du manque d’eau au niveau de la planète sont, parmi d’autres, les effets sur les populations de phénomènes « naturels ». Une bonne approche doit lier durabilité et équité tandis que les solutions pour être efficaces doivent être adaptées à chaque contexte.
Le rapport sur le développement humain 2011 du Programme des Nations Unies pour le développement  (PNUD), part du constat que

l’équité, l’autonomisation et la durabilité favorisent la multiplication des choix accessibles aux personnes. [[highslide](23;23;;;)
Rapport sur le développement humain 2011 : Durabilité et équité : Un meilleur avenir pour tous, PNUD
[/highslide]]

Il s’agit d’abord de justice distributive. La privation d’eau, d’énergie ou de terres à cultiver sera plus marquée au sein des populations multi-dimensionnellement pauvres. La résilience des populations face aux catastrophes naturelles dépendra également du niveau de développement des pays où elles se produisent. Si la moyenne des niveaux de vie a augmenté

l’inégalité s’accroît en même temps que la richesse. [[highslide](24;24;;;)
Métamorphose, René Passet, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 278
[/highslide]]

De plus, non seulement l’inégalité touche les revenus mais  l’insécurité s’y ajoute, puisque 5,3 milliards de personnes n’ont accès à aucune couverture sociale [[highslide](25;25;;;)
Emplois verts : Pour un travail décent dans un monde durable, à faibles émissions de carbone, Messages politiques et principales conclusions à l’intention des décideurs, PNUE, 2008, p.9
[/highslide]].
Des synergies intéressantes entre durabilité et équité sont à développer. Il est possible de réaliser des systèmes décentralisés hors réseau pour fournir des services énergétiques aux ménages pauvres. Leur mise en place aurait un impact minimal sur le climat et les finances. On estime que la fourniture de services énergétiques de base à tout le monde n’augmenterait que de 0,8% les émissions de CO2 compte tenu des engagements politiques généraux adoptés [[highslide](26;26;;;)
Rapport sur le développement humain 2011 : Durabilité et équité : Un meilleur avenir pour tous, PNUD
[/highslide]].
Les problèmes environnementaux ont plusieurs caractéristiques qui nous mettent dans une situation inconnue jusqu’à maintenant et que nous avons de la peine à cerner. L’imprévisibilité des phénomènes, leur invisibilité parfois, « les risques technologiques différés cumulatifs globaux » [[highslide](27;27;;;)
Les risques technologiques : un essai de typologie, D. Bourg et J.-L. Ermine, revue Quaderni, Sapientia, 2002
[/highslide]], les incertitudes sur les causes ou les conséquences créent un contexte pour le moins incertain. L’interaction avec d’autres variables comme les facteurs  sociaux, eux même en évolution, multiplie les inconnues.
C’est dans ce contexte que se situe le principe de précaution, cette nouvelle norme sociale. [[highslide](28;28;;;)
Durabilité du développement et principe de précaution, Olivier Godard, in Les nouveaux utopistes du développement durable, sous la direction d’Anne-Marie Ducroux, Autrement, 2005, p. 187
[/highslide]]
Inscrit dans le principe 15 de la déclaration de Rio de 1992, il est également l’un des principes reconnus par le Traité de Maastricht.
Il serait intéressant que le principe de précaution lié aux risques naturels et technologiques s’étende aux « risques sociaux ». Là aussi les conséquences peuvent dépasser les prévisions ou les invalider. Des droits obtenus de longue lutte, les fruits de la cohésion sociale ou la représentation de la société civile sont des ressources humaines précieuses. L’universalité des Droits sociaux une condition aussi fondamentale que la dimension planétaire de l’action environnementale ?
Oxfam défend une série de droits universels fondamentauxcomme le droit aux moyens d’existence durables, aux services sociaux de base ainsi que le droit à la vie, à la paix et à la sécurité, sans oublier le droit d’expression et l’équité de genre. Le maintien de ces droits en temps de crise économique et écologique, partout dans le monde, est important à rappeler, d’autant plus à la veille du Sommet mondial dela Terre de Rio.

Catella Willi