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Développement durable, ne perdons pas le Sud…

Analyses
Développement durable, ne perdons pas le Sud…


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Comment nourrir 9 milliards de personnes d’ici 2050 en émettant 90% d’émissions de C02 en moins ? Une autre question devrait suivre immédiatement. Comment le faire de manière juste ? En effet, 1,4 milliard de personnes vivent toujours dans des conditions d’extrême pauvreté et 1/6 de la population mondiale souffre de malnutrition [[highslide](1;1;;;)
Rio+20 : vers une économie verte et une meilleure gouvernance, Communication de la Commission au parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions.
[/highslide]]. La demande en eau devrait, elle, augmenter de 30% d’ici 2030 alors que l’eau potable manquait déjà à 884 millions d’êtres humains en 2010 [[highslide](2;2;;;)
Progress on sanitation and drinking water : 2010 update, Programme OMS/UNICEF de surveillance de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement, 2010, pp. 6-7
[/highslide]]. Quant aux rendements agricoles, leur croissance n’atteint plus que 1% par an, bien en deçà de la croissance de la demande. Le changement climatique ne fait qu’aggraver la situation. En matière environnementale aussi, la situation n’est pas la même, selon qu’on vive au Nord ou Sud de la planète, qu’on ait ou non les moyens financiers et logistiques de réagir.

Les enjeux du Sommet de Rio dans l’hémisphère Sud

La déclaration du Sommet de la Terrede Rio de 1992 stipule : « L’élimination de la pauvreté et la réduction des inégalités entre les peuples sont des conditions essentielles d’un développement qui satisfasse durablement les besoins de la majorité des habitants de la planète. » Si la pauvreté absolue a baissé, la pauvreté relative a augmenté, et pas seulement à cause de la crise actuelle qui s’est étendue à l’ensemble des pays. Le développement durable [[highslide](3;3;;;)
« mode de développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs », in Our common future, Rapport de Brundtland, 1987
[/highslide]] pourrait être une opportunité de développer la solidarité internationale au niveau social et environnemental. A long terme, la viabilité des économies en dépend, tandis qu’à court terme il s’agit d’une question de survie pour nombre de populations du Sud. Des précédents existent.

Ainsi les scientifiques attribuent aujourd’hui l’effondrement longtemps mystérieux de la société Maya, à une augmentation rapide de l’aridité du climat. [[highslide](4;4;;;)
Abrupt climat change, R. Alley, in American Scientific, novembre 2004
[/highslide]]

Même si dans certains pays commela Chine la dégradation de l’environnement est perçue, lors de catastrophes naturelles, comme une menace immédiate et a donné lieu à des manifestations, la voix des peuples les plus touchés peine à se faire entendre.
Le Sommet de Rio, en juin prochain, pourrait être une opportunité de changer dans la durée et partout à la fois un mode de fonctionnement dominé par le libéralisme. Ceci impliquerait de ne pas soutenir les fausses solutions et les solutions non durables pour les pays en voie de développement (agro-carburants – OGM – accaparement de terres, prêts…) décidées sans l’accord et la participation réelle des populations et de leurs représentants. L’accaparement des terres est un véritable enjeu stratégique pour des pays du Sud, notamment en Afrique et en Asie du sud-est mais ailleurs aussi. Qu’il s’agisse des approvisionnements alimentaires, des agro-carburants, de l’extraction minière, d’industrialisation, de tourisme de masse ou encore de la spéculation sur les excédents de quotas d’émissions de carbone, tout concourt à déposséder, ici et là, les communautés paysannes locales.
Cette situation n’est pas due au hasard mais provient de choix discutables dans  l’aménagement du territoire. Par ailleurs la prise en compte de crédits carbone issus de la biomasse pose la question de la marchandisation des biens communs. On déplace le problème de chez nous à d’autres latitudes. Oxfam est opposée à cette marchandisation des ressources et recommande de restaurer un équilibre entre pays à haute empreinte et pays à basse empreinte environnementale. L’usage disproportionné des ressources ne respecte pas le principe de l’équité. C’est raisonner en termes de « lois du marché » alors qu’il s’agit de question de « droits ».  Droit à l’alimentation, à l’eau, à un environnement sain, entre autres. Valeur de « service éco-systèmique » aussi.

Dans le contexte des crises actuelles, l’acquisition de terres est devenue un enjeu stratégique à long terme pour des entreprises agroalimentaires ou du secteur financier et certains Etats. Et la tendance s’accentue. [[highslide](5;5;;;)
Stéphane Parmentier, in Main basse sur les terres, Dossier Terre : pas à vendre ni à louer, Globo, Oxfam Solidarité, Septembre 2011, p. 8
[/highslide]]

Pour lutter contre le phénomène, de nouvelles alliances entre organisations paysannes du Sud et du Nord [[highslide](6;6;;;)
Via Campesina est un mouvement paysan international.
[/highslide]] se nouent et renforcent le plaidoyer auprès des autorités nationales, voire supranationales. La Fédération internationale des producteurs agricoles (Fipa) a longtemps détenu le monopole de la parole des agriculteurs du monde entier. Mais aujourd’hui elle n’existe plus. C’est Via Campesina qui occupe le devant de la scène internationale.

Cet acteur émergent se démarque plus nettement que la Fipa par sa militance en faveur d’une agriculture paysanne respectueuse de l’environnement, par opposition à l’agriculture industrielle et à l’agrobusiness. [[highslide](7;7;;;)
Du plaidoyer national au plaidoyer international, in Dossier Les nouvelles alliances paysannes, Défis Sud, juin-juillet 2011, p. 11
[/highslide]]

Via Campesina est très critique vis-à-vis de l’économie verte au programme du prochain Sommet de Rio, qui, selon l’ONG, est

promue comme une façon de mettre en place un développement durable pour les pays qui continuent à souffrir de la pauvreté, de la faim et de la misère. En fait les propositions s’apparentent à des « programmes d’ajustements structurels verts » dont le but est de réaligner les marchés nationaux et les règlements sur le nouveau « capitalisme vert ». [[highslide](8;8;;;)
Prenons en main notre futur : Rio + 20 et au-delà, Via Campesina
[/highslide]]

Pour les pays à faible revenu, la notion de « capital naturel » est essentielle.

La voie du développement devrait entretenir, améliorer et, si nécessaire, restaurer le capital naturel  considéré comme un atout économique crucial et une source de bienfaits publics, surtout pour les populations pauvres dont les moyens d’existence et la sécurité dépendent de la nature. [[highslide](9;9;;;)
Vers une économie verte : Pour un développement durable et une éradication de la pauvreté, PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement), 2011, p. 9
[/highslide]]

A l’exemple des pêcheurs qui dépendent des réserves halieutiques pour la survie de leur activité mais aussi pour l’approvisionnement de leurs familles en nourriture de base. Malheureusement seuls 20% des stocks de poissons commerciaux ne sont pas surexploités [[highslide](10;10;;;)
La situation mondiale de la pêche et de l’aquaculture, 2008, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, 2009, p.30
[/highslide]] tandis que les déchets marins, la pollution et l’acidification des océans sont une menace pour la biodiversité marine. A noter que la réduction des stocks de poissons s’explique, entre autres, par les subventions octroyées dont 60% sont néfastes car elles induisent la pêche industrielle et la surpêche au détriment de la pêche vivrière.
Dans d’autres cas, les ressources naturelles sont inconvénient pour les pays du Sud qui tirent exclusivement des revenus des cultures de rente ou des matières premières. Si les sommes récoltées ne sont pas investies dans le développement du pays (éducation, santé, infrastructures, développement durable), les ressources deviennent un handicap sur le long terme. A l’inverse, des ressources dormantes comme les déchets, quand ils sont réutilisés, fournissent à un pays comme le Brésil 170.000 emplois (recyclage des boîtes d’aluminium) [[highslide](11;11;;;)
Emplois verts : Pour un travail décent dans un monde durable, à faibles émissions de carbone, PNUE, 2008, p. 28
[/highslide]]. De même, nombre de graines, fruits, feuilles d’arbres, bouteilles de verre ou feuilles d’aluminium récupérées servent à fabriquer des objets d’artisanat de commerce équitable, activité locale complémentaire à l’agriculture vivrière ou à l’activité domestique, pour les femmes. [[highslide](12;12;;;)
Voir : objets d’artisanat à partir de produits réutilisés ou recyclés
[/highslide]]
Vu les enjeux, la conférence de Rio+20 [[highslide](13;13;;;)
Sommet de la Terre 2012
[/highslide]] devrait donner un signal très clair à la communauté internationale. Il ne faudrait pas qu’à l’instar du Sommet de Johannesburg, le Sommet de Rio ne fasse que dresser un bilan et renouveler l’engagement en faveur du développement durable. Or, après le Sommet de Copenhague, ressenti comme un échec, les opinions publiques ne sont pas gagnées d’avance. De plus, la crise économique qui sévit dans de nombreux pays éloigne encore plus les citoyens des questions environnementales et des pays pauvres. Quant aux pays émergents, ils sont gagnés par la course à la croissance, parfois quel qu’en soit le prix. Or ces pays comptent près de 50% de la population mondiale [[highslide](14;14;;;)
En 2009, l’Afrique du Sud, le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Mexique et la Russie comptaient 3,2 milliards d’habitants. Source : Banque mondiale, World Development Indicators, 2010.
[/highslide]]. En outre les Nations unies estiment que les émissions de la Chine et de l’Inde réunies s’élèveront à 24% des émissions totales de CO2, en 2020. [[highslide](15;15;;;)
Rapport de la 3ème session du Conseil économique et social pour l’Asie et le Pacifique
[/highslide]]
L’éradication de la pauvreté et la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire (OMD) devraient être la priorité de Rio+20. Comme l’accès à la nourriture, à l’eau et à l’énergie dépend du bon fonctionnement des écosystèmes, la préservation des ressources naturelles est essentielle. Cependant, les pays en voie de développement (PED) payent un tribut si lourd aux pays riches et aux pays émergents qu’il faut d’urgence une feuille de route et des moyens pour honorer les engagements pris vis-à-vis d’eux par la communauté internationale.
Respecter la contribution fixée à 0,7% du PIB, lors des Objectifs du Millénaire pour le développement est un objectif jamais atteint alors que, dès les années 1960, le principe de 1% d’aide publique avait été adopté par les Nations Unies dans le cadre de la Décennie du développement. Un peu comme si, face aux demandes des institutions supra nationales, nos pays n’honoraient pas leurs engagements pendant des dizaines d’années alors que les citoyens sont appelés chaque jour à le faire vis-à-vis de leurs instances. Plus encore, l’aide aux pays pauvres est même en baisse pour la première fois depuis 15 ans. Elle se monte à 0,31% des richesses nationales en 2011 alors qu’elles étaient de 0,32% en 2010. En ces temps d’austérité, l’objectif de 0,7% semble s’éloigner plus qu’il ne se rapproche.

Un document préparatoire qui laisse perplexe

Malheureusement, le document préparatoire au Sommet de la Terrede juin, qu’on appelle le zéro draft n’est guère rassurant [[highslide](16;16;;;)
The zero draft : The future we want 
[/highslide]]. Vingt ans après Rio, les constats relatifs à la dégradation accrue de l’environnement, aux objectifs non atteints des conventions sur les changements climatiques, la biodiversité et la désertification ainsi que ceux relatifs à l’augmentation des inégalités et de la faim sont trop peu développés et analysés. Le fait que la richesse mondiale ait doublé depuis 1992 sans que ces gains économiques ne se soient traduits par une diminution des inégalités et une amélioration de notre environnement n’apparaît nulle part. C’est donc bien notre modèle de développement qui doit être mis en cause. Encore plus dans les pays du Nord, c’est-à-dire aussi ceux qui popularisent ce mode de vie :

Si les habitants des pays du Sud veulent imiter le mode de vie occidental, c’est aussi à cause des pressions des multinationales, qui voient dans ces pays un marché intéressant. [[highslide](17;17;;;)
Michel Genet, Greenpeace, in Quand social et environnemental se rencontrent, Déclics (& des claques), Oxfam-Magasins du monde, 2010, p.15
[/highslide]]

Le zéro draft ne prévoit ni ne suggère aucun des changements de paradigme que nécessite l’état de la planète et la non atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement. A mettre au compte des opportunités manquées, 10 ans après leur adoption :

aucune avancée commerciale n’a été enregistrée en termes d’accès au marché et de traitement spécial et différencié pour les pays pauvres, du fait du blocage des négociations à l’OMC et de la prolifération d’accords bilatéraux Nord-Sud par lesquels les pays industrialisés tentent de libéraliser des secteurs que les pays en développement refusent. [[highslide](18;18;;;)
Les objectifs du millénaire : un bilan critique 10 ans après leur adoption, Arnaud Zacharie, CNCD, 2010
[/highslide]]

La récente crise économique, la hausse des prix alimentaires et énergétiques se sont traduites par l’augmentation des personnes vivant dans la pauvreté.
Dans le document, il n’est pas fait non plus allusion aux principes fondateurs de Rio qui sont la responsabilité commune mais différenciée des pays en matière d’environnement, l’équité dans le droit au développement et le principe de précaution. Le dépassement de la bio-capacité terrestre n’est pas clairement exposé. Le texte pêche par un manque de recommandations de type opérationnel (implémentation et indicateurs) alors que c’est précisément ce qui explique la non-atteinte des objectifs émis lors dela Conférence de Rio de 1992. Et cela alors même que les études et propositions concrètes sont largement disponibles.

Des impacts environnementaux lourds de conséquences sur le plan social

L’érosion des sols, la désertification, le réchauffement climatique, les pollutions industrielles touchent d’abord les plus pauvres et sont un facteur d’accroissement des inégalités. La désertification menace les régions arides, qui hébergent environ 1/3 de la population mondiale. Si rien n’est fait dans les décennies à venir, on estime de 30 à 50% le renchérissement des denrées alimentaires en raison de facteurs environnementaux défavorables. Les plus grands risques menacent 1,3 milliard de personnes vivant de l’agriculture, de la pêche, de la sylviculture, de la chasse et de la cueillette [[highslide](19;19;;;)
Durabilité et équité : Un meilleur avenir pour tous, Rapport sur le développement humain 2011
[/highslide]]. A titre d’exemple, même si la déforestation s’est ralentie, l’Amérique du sud et l’Afrique montrent toujours la plus grosse perte nette de forêts.

Le thème de la déforestation cristallise de façon exemplaire les débats qui traversent les relations entre développement durable et développement au Sud. Effectivement, la forêt apparaît simultanément comme étant un capital naturel en grand danger de déplétion accélérée (à la base des approches conservationnistes) et comme une source indispensable de revenu pour les pays du Sud (entre autre les populations les plus pauvres). [[highslide](20;20;;;)
Quel développement durable pour les pays en voie de développement ? Cahiers du GEMDEV no. 30 (Groupement d’Intérêt Scientifique pour l’Etude de la Mondialisation et du Développement), Novembre 2005
[/highslide]]

Même si les dégradations sont dues notamment aux modes de vie des pays développés et émergents,

si on parle changement climatique au Mali, les gens font le lien avec les problématiques locales, en l’occurrence la consommation de bois, la manière de couper les arbres… Dans les pays du Sud, on intériorise une réalité propre locale. Je pense que c’est d’ailleurs une leçon d’humilité par rapport à notre absence de responsabilité [[highslide](21;21;;;)
Le développement durable : instrument de dialogue ou de domination Nord/Sud, Luc Lamprière, Oxfam France, 5 janvier 2011
[/highslide]]

remarque un observateur. La mobilisation locale par et pour les populations concernées est importante à rappeler :

L’Afrique par exemple n’attend pas des réponses de la part du Nord pour évoluer. Il y a une richesse des sociétés africaines, des médias africains, qui constituent autant d’espaces d’expression politique et de force de proposition, conditions indispensables pour travailler sur un développement durable équilibré. [[highslide](22;22;;;)
Le développement durable : instrument de dialogue ou de domination Nord/Sud, ibid.
[/highslide]]

Le concept du « Donut » inventé par Oxfam à partir d’un article sur les 9 limites planétaires [[highslide](23;23;;;)
A safe operating space for humanity
[/highslide]] propose un cadre visuel sous la forme d’un donut.

Il rassemble les limites planétaires et les limites sociales, créant un espace sûr et juste entre les deux, dans lequel l’humanité peut se développer. Pour se placer dans cet espace, il est nécessaire d’assurer bien plus d’équité – au sein même des pays et entre eux – sur le plan de l’utilisation des ressources naturelles, et bien plus d’efficacité dans la transformation de ces ressources pour satisfaire les besoins humains.

Un « seuil social » existe.

Des solutions structurelles existent

La coopération Sud-Sud entre pays qui ont des préoccupations similaires est à encourager en matière environnementale. Ceci aussi pour améliorer la circulation de l’information, le savoir-faire et la technologie, à un coût réduit. Les projets de reforestation, de préservation de ressources naturelles, d’énergie renouvelable donnent lieux à des échanges quand le contexte est comparable. A l’inverse, les conflits qui tirent leur origine de la dispute autour des ressources naturelles comme l’eau, les matières premières ou les terres créent dans les régions du Sud les obstacles à la coopération entre régions ou pays voisins. Là aussi, les changements climatiques vont favoriser des déplacements de populations (inondations, montée des eaux, désertification) qui vont diluer les espoirs de coopération.
Produites en grande partie dans l’hémisphère Nord, les ressources financières sont aussi concentrées dans une vingtaine de marchés émergents de l’hémisphère Sud. Par contre, les pays les plus pauvres sont exclus de la dynamique financière des pays leader du Nord et du Sud. Seule la mise en place d’une fiscalité internationale pourrait répondre à la loi du marché par une meilleure régulation.La TTF (Taxe sur les Transactions Financières) serait une solution qu’Oxfam soutient. Des compensations pour la dette écologique induite par des modes de production et de consommation non soutenables pourraient se mettre en place. Même si l’objectif premier est de travailler sur la source de ces fléaux, dans l’immédiat, les sommes dégagées pourraient compenser les effets des inondations, de la sécheresse, la dégradation des ressources naturelles, l’augmentation des maladies parasitaires…
Parmi les mesures structurelles à prendre, citons aussi celles liées aux Objectifs du m-Millénaire :

l’annulation de la dette du tiers-monde, la réforme du commerce international, l’augmentation de l’aide au développement ou la réforme des politiques menées par les institutions financières internationales. [[highslide](24;24;;;)
Objectifs du millénaire pour le développement, Oxfam Solidarité
[/highslide]]

En aval, des solutions existent qui combinent environnement et développement humain. Le dernier Rapport sur le développement humain en évoque plusieurs [[highslide](25;25;;;)
Durabilité et équité : Un meilleur avenir pour tous, Rapport sur le développement humain 2011
[/highslide]]. L’extension des choix de reproduction s’intègre dans la prévention de la dégradation de l’environnement. Des méthodes d’intervention adaptatives, des modèles décentralisés de réduction des risques sont aussi à promouvoir. Pour cela une cartographie communautaire des risques pourrait aider à les cibler. La distribution plus progressive de biens reconstruits en cas de catastrophe naturelle et la promotion de la gestion communautaire des forêts élargiraient l’éventail des mesures.
Du côté de l’agriculture, essentielle en matière d’approvisionnement local de nourriture donc de souveraineté alimentaire, les pratiques durables se traduisent par des gains de productivité importants.

L’étude de 286 projets portant sur les bonnes pratiques de 12,6 millions d’exploitations dans 57 pays en développement a révélé que l’adoption d’approches de protection des ressources (gestion intégrée des ennemis des cultures, des nutriments, travail minimal du sol, agroforesterie, aquaculture, récolte de l’eau et intégration de l’élevage, par exemple) entraînait une augmentation moyenne des rendements de 79% et améliorait l’offre de services environnementaux essentiels. [[highslide](26;26;;;)
Resource conserving agriculture increases yields in developing countries, J. Pretty, A.D. Nobel, D. Bossio, J. Dixon, R.E. Hine, F.W.T.Penning De Vries, J.I.L., Environmental science and technology, 40, 2006, p. 1114
[/highslide]]

Quand on sait que la dégradation des sols est directement liée à l’agriculture et a une incidence directe sur quelque 1,5 milliard de personnes, dont 42% des plus démunis de la planète, on mesure l’importance des bonnes pratiques en matière d’agriculture.

Si ce n’était le climat…

En matière climatique, l’addition payée par les pays du Sud est aussi plus importante :

Les pays développés sont responsables de la plus grande partie du réchauffement global mais les pays en développement sont ceux qui en ressentent le plus fortement les effets et qui ont le moins de moyens pour s’y adapter. C’est l’injustice fondamentale des changements climatiques. [[highslide](27;27;;;)
Les changements climatiques et la politique belge de coopération au développement : défis et opportunités, Jean-Pascal Van Ypersele, juin 2008, p.9
[/highslide]]

C’est pourquoi les pays industrialisés devraient davantage contribuer au financement des politiques climatiques du Sud. Selon la plateforme Justice climatique, qui a émis 11 revendications en la matière,

l’Europe et la Belgique doivent mettre en œuvre des mécanismes de financement innovants et publics pour alimenter le nouveau fonds climat des Nations Unies. Ces nouveaux moyens doivent être additionnels à ceux qui ont été promis pour l’atteinte des Objectifs du Millénaire (0,7% du PIB). [[highslide](28;28;;;)
Extrait des 11 revendications – Plateforme Justice Climatique – CNCD
[/highslide]]

D’ailleurs,

l’article 4 de la Convention Cadre des Nations Unies pour les Changements Climatiques (CCNUCC) mentionne très clairement le financement des efforts d’adaptation : Les pays développés (…) aident également les pays en développement parties particulièrement vulnérables aux effets néfastes des changements climatiques à faire face au coût de leur adaptation aux dits effets. Cependant, la question de la vulnérabilité et de la répartition des fonds n’est pas précisée. Doivent-ils être attribués aux pays, au prorata de leur vulnérabilité ? Ou doivent-ils être attribués à des projets établis sur base des besoins spécifiques ? [[highslide](29;29;;;)
La Justice Climatique… à l’épreuve des négociations, Véronique Rigot et Nicolas Van Uffel, Points Sud : Les études du CNCD, Novembre 2011, p.14
[/highslide]]

Dans tous les cas la recherche doit tout particulièrement être poursuivie à l’échelle locale. Dans ce domaine, c’est en Afrique que les besoins les plus pressants et les défis sont les plus difficiles à relever, en raison du manque de scientifiques et d’équipements météorologiques. C’est le cas aussi de la recherche agricole négligée depuis la Révolution verte des années 1960 et 1970 [[highslide](30;30;;;)
Le développement durable, une nécessité pour les pays du Sud, P. Jacquet et J. Loup, in Regards sur la Terre, 2009, p.192
[/highslide]].

Durabilité et équité

Une autre manière d’aborder la question est d’évoquer la nécessité de systèmes de protection sociale innovants permettant d’amortir l’injustice environnementale et climatique. En effets les politiques et les pratiques commerciales inéquitables, les pertes de revenus à cause du dumping social, l’absence de protection des plus défavorisés sont en amont d’une stratégie de l’exploitation, en contradiction avec la dimension sociale du développement durable.

Le centrage sur la pauvreté nous permet d’examiner les privations environnementales en termes d’accès aux combustibles de cuisson, à l’eau salubre et à l’assainissement de base. Ces privations absolues, importantes en soi, constituent aussi des violations majeures des droits humains. [[highslide](31;31;;;)
Durabilité et équité : Un meilleur avenir pour tous, ibid.
[/highslide]]

L’exposition aux substances dangereuses (pesticides et déchets dangereux) se poursuit dans les pays en voie de développement et les économies émergentes, malgré les progrès réalisés dans le cadre des conventions internationales.
Les politiques de conservation de la nature issues dans certains cas de politiques colonialistes ne sont pas la panacée. C’est le cas à Madagascar où les communautés paysannes n’ont pas été suffisamment impliquées dans la politique environnementale. La logique descendante de mesures qui n’intègrent pas assez les parties prenantes est à mettre au compte de problèmes de gouvernance non nécessairement relevés par les bailleurs de fond internationaux. Or le travail d’ONG sur le terrain montre qu’on peut associer développement et conservation de la nature, par la formation, l’accompagnement de micro-projets agricoles complémentaires à la préservation de la forêt. Mais il reste que des politiques uniquement conservationnistes, non conçues pour le profit des plus pauvres alimentent la bureaucratie locale et les expatriés.

Tout compte fait, il semble que les principaux bénéficiaires de cette politique soient les acteurs extérieurs ou l’élite citadine du pays, et non les paysans, soit la majeure partie de la population, et la première intéressée par la gestion des ressources naturelles. [[highslide](32;32;;;)
Ibid, p.274
[/highslide]]

Pour terminer rappelons que, historiquement, l’émergence du concept de développement durable est liée à l’inquiétude des pays du Nord face aux dommages environnementaux provoqués par leur croissance. Ce qui ne veut pas dire que la détermination des ces pays à agir rime avec la prise de conscience de départ. Plus encore, certaines politiques de développement (biocarburants) ou de captation de ressources (pêche par des flottes européennes au large de l’Afrique) atténuent ou annulent les effets de politiques en faveur du développement durable dans les pays du Sud.

Cette situation n’est bien sûr pas nouvelle : une contradiction semblable existait déjà dans le passé entre les objectifs d’aide de nombreux pays donateurs et les impacts négatifs de leurs politiques commerciales ou d’exportation d’armement. C’est cependant dans le domaine de l’environnement que cette contradiction est la plus flagrante. [[highslide](33;33;;;)
Sustainable Development in European Cooperation Policy, in Europe and Sustainable Development, Paris, Cultures France, coll. Penser l’Europe, 2008
[/highslide]]

Donc, chez nous, des changements de méthode sont à promouvoir. Parmi les recommandations d’associations belges réunies, en 2011, pour inventer une société durable en 2050, on peut lire :

Chaque décision prise en Belgique fera l’objet d’une évaluation de son impact sur le développement durable, notamment au plan international. Si un impact est avéré à l’étranger, la décision devra être validée en conseil des Ministres afin d’assurer la cohérence de la décision avec les politiques de coopération au développement. [[highslide](34;34;;;)
Télescope : quand la société civile imagine une société durable en 2050, Associations 21, VODO, 2012, p. 40
[/highslide]]

Comment mener idées et projets à bien ? Oxfam mène des actions d’éducation, de sensibilisation, de recherche, de plaidoyer et de mobilisation en faveur du développement durable, de l’alimentation durable et de la justice climatique. Elle assume le rôle de veille et interpelle régulièrement le pouvoir politique. Elle est membre du Conseil fédéral du développement durable (CFDD) et participe à nombre de groupes de travail, tables rondes, forums et séminaires en lien avec les pays en voie de développement : questions liées à l’accès des droits essentiels, au droit en situation de crise, au travail décent, au genre, à la qualité de l’aide… Oxfam sera présente au Sommet de Rio et participera au Forum des Peuples organisé parallèlement à la conférence des Nations unies.

Catella Willi